FORUM PARLEMENTAIRE À L'OCCASION DU FORUM DE VIENNE SUR LA LUTTE CONTRE LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS
- Vienne, 12 février 2008 -

 

 

 

 

Verginia VEDINAª

Membre du Sénat de la Roumanie

 

 

 

Madame la Présidente,

Chers collègues,

 

Mon nom est Verginia VEDINAª, je suis membre du Sénat de la Roumanie et secrétaire de la Commission juridique de cette Chambre. Avec votre permission, j’aimerais commencer en félicitant l’Union interparlementaire, le Parlement de l’Autriche et l’UN.GIFT pour l’organisation de cette réunion. Je tiens aussi à remercier nos hôtes de leur chaleureux accueil.

 

La lutte contre la traite des personnes, la protection des victimes et le respect de leurs droits représentent tout autant de priorités pour la Roumanie, en tant que pays d’origine, de transit et, plus récemment, de destination.

 

En effet, le phénomène de la traite a connu en Roumanie plusieurs étapes, suite aux profonds changements économiques, politiques et sociaux des dernières années. La transition vers l’économie de marché a engendré des coûts sociaux pour la plupart de la population. À leur tour, ces coûts ont favorisé l’apparition de ce fléau qui a fait de nombreuses victimes de parmi les personnes vulnérables. 

 

De concert avec les actions de l’Union européenne et de la communauté internationale, les autorités roumaines ont adopté au cours des dernières années un ensemble de mesures d’ordre législatif, institutionnel et autres, destinées à mettre au point et à consolider le dispositif national de prévention et de lutte contre la traite des êtres humains. 

 

L’action législative du Parlement s’est concrétisée principalement par une série de lois qui portent sur: la prévention et la lutte contre la traite des personnes (2001)[1] ; la protection des témoins (2002); la prévention et la lutte contre la criminalité organisée (2003); la protection des victimes des infractions (2004), ainsi que sur la lutte contre la marginalisation sociale (2002) et le système national d’assistance sociale (2006), pour ne mentionner que les plus importantes.

 

En 2002, le Parlement a ratifié la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. De même, en 2006, on a ratifié la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains, la Roumanie étant parmi les premiers pays parties à cet instrument novateur, qui vient d’entrer en vigueur[2].

 

Au plan institutionnel, en 2006 on a créé une structure administrative spécialisée, pour assurer une réponse plus rapide et plus efficace à ce phénomène dont l’ampleur était sans précédent. L’Agence nationale contre la traite des personnes est chargée de coordonner, évaluer et suivre la mise en pratique, au niveau national, des activités de prévention, ainsi que la protection et l’assistance accordée aux victimes. En même temps, l’Agence recueille, estoque, traite et analyse les données et les informations relevant de son domaine de compétence; elle fournit les données officielles en la matière et facilite les échanges de données et d’informations statistiques entre les institutions concernées, du pays où de l’étranger.

 

En 2007, l’Agence a mis au point une Base nationale de données portant tant sur les mesures contre la traite, que sur la prévention et l’assistance accordée aux victimes dans la perspective de leur réinsertion sociale. Cette base nous a permis, entre autres, d’établir les possibles typologies des victimes et les modes d’opération utilisés par les trafiquants pour chaque catégorie de traite.   

 

J’ajoute aussi que depuis 2006, les activités en la matière sont fondées sur la Stratégie nationale contre la traite des personnes pour la période 2006-2010, et le Plan d’action correspondant. La stratégie est harmonisée avec le Plan de l’Union européenne concernant les meilleures pratiques, normes et procédures pour prévenir et combattre la traite des êtres humains et repose sur les suivants principes-clé : le respect des droits et des libertés fondamentaux de la personne; la légalité; la prévention; la complémentarité, la transparence et le dialogue social; la coopération inter - institutionnelle; le partenariat public - privé ; la responsabilité ; la confidentialité.          

 

Vu que notre réunion est une occasion d’échanger des informations et de partager des expériences nationales, il me semble important de vous présenter les activités prioritaires que nos autorités envisagent pour l’année en cours, et que le Parlement roumain suit avec beaucoup d’attention par le truchement de ses instances spécialisées, à savoir:

 

-         - la mise en pratique de programmes ciblés de formation initiale, destinés aux agents de la police de proximité, rurale et routière ;

-         - une évaluation du degré de sensibilisation de la population au phénomène de la traite des personnes, dont les résultats seront utilisés dans les futures campagnes publiques de prévention ;

-         - le développement de partenariats nationaux, à base de protocoles de collaboration, entre les acteurs institutionnels concernés, notamment les ministères de l’éducation, du travail et de la culture et, respectivement, l’Agence nationale pour l’emploi ;

-         - une coopération renforcée avec les pays de destination, pour réduire le nombre des victimes roumaines de la traite et leur garantir une assistance adéquate ;

-         - le développement de la coopération avec les pays voisins, afin de prévenir la traite et de porter secours aux victimes.

 

En même temps, le Parlement se préoccupe constamment d’adapter le cadre juridique relatif à la traite des personnes, en conformité avec l’acquis de l’UE et le droit international. Le plus récent exemple est la révision, en cours, de la Loi sur la prévention et la lutte contre la traite des personnes, qui vise, principalement, à:

 

-         - incriminer le client pour l’utilisation, en connaissance de cause, des services d’une victime de la traite, ce qui correspond aux dispositions de la nouvelle Convention du Conseil de l’Europe [sur la lutte contre la traite des êtres humains] ;

-         - introduire une définition pour la notion de victime de la traite des personnes ;

-         - qualifier comme infraction de traite des êtres humains la vente et l’achat d’une personne ;     

-         - instituer le logement protégé, de type familial, pour les victimes.

 

Outre l’adoption des lois, il faut mentionner que le parlement se doit de veiller à ce que les politiques relatives à la traite des personnes soient conçues et mises en pratique en corrélation avec les autres politiques sectorielles, notamment dans les domaines économiques, du logement, de l’éducation, de l’emploi et autres.    

 

Pour ce qui est du dialogue interparlementaire, je voudrais souligner quelques idées :

 

-         - les débats organisés au sein des forums parlementaires à vocation internationale, régionale ou sous-régionale, ainsi que les documents  adoptés ont une importance incontestable pour des raisons que nous partageons tous (et l’exemple le plus à l’aise sont les recommandations d’action parlementaire concernant la migration, la traite, la xénophobie et les droits de l’homme, telles qu’elles figurent dans les documents élaborés pour la prochaine session de l’UIP);

-         - dans la poursuite des échanges parlementaires relatifs à la traite des personnes, il serait souhaitable de se pencher davantage sur le respect des droits des victimes ; ce sujet pourrait être examiné en détail lors des futures réunions des instances parlementaires pour les droits de l’homme ;

-         - en complémentarité avec les démarches parlementaires au plan multilatéral, le thème de la traite des personnes devrait être systématiquement inclus sur l’agenda des relations parlementaires entre pays d’origine, de transit et de destination. Je pense surtout au dialogue et à la coopération entre groupes parlementaires d’amitié ou commissions spécialisées, dans un format bi- ; tri- ou plurilatéral, selon le cas.

 

En guise de conclusion, je citerai un paragraphe du rapport explicatif à la nouvelle Convention du Conseil de l’Europe, que je trouve tout à fait compréhensif du point de vue action, y compris en ce qui concerne le rôle des parlements: "Si l'on veut qu'elle soit efficace, la stratégie de lutte contre la traite des êtres humains doit être fondée sur une approche multidisciplinaire qui passe à la fois par la prévention, la protection des droits de la personne humaine des victimes et la poursuite des trafiquants, tout en veillant à ce que les législations pertinentes des Etats soient harmonisées et appliquées uniformément et efficacement".

 

Je vous remercie.

 

 

 

[1] Telle qu’ultérieurement modifiée et complétée.

 

[2] Le 1er février 2008